Les religions telles que nous les connaissons aujourd’hui n’ont pas toujours été organisées de cette manière. Au tout début, les premières civilisations avaient des croyances plus ou moins structurées avec l’existence de plusieurs dieux à servir. La société essayait au mieux de s’unifier autour de ces nombreuses divinités et de vivre en harmonie avec ces derniers.
Mais quel est le plus vieux système de croyances ayant existé ? Quelle est son origine et quels sont les différents rites qui le caractérisaient ? Éléments de réponses.
Le premier système de croyances parfaitement élaboré
Les religions ont probablement toujours existé depuis la présence des premières civilisations humaines sur terre. Ainsi selon le sociologue des religions Yves Lambert, nous pouvons repartir les systèmes de croyances dans cinq grands groupes correspondant aux plus grandes évolutions de l’homme. Nous avons de cette manière :
- les religions des chasseurs-cueilleurs à tradition orale, période axiale : mésolithique ;
- les religions agropastorales à tradition orale, période axiale : néolithique ;
- les religions polythéistes antiques à tradition écrites, période axiale : formation des royaumes et empires antiques ;
- les religions de Salut universalistes, période axiale : formation des grands empires et grandes aires civilisationnelles politico-religieuses ;
- les transformations des religions de Salut, période axiale : la modernité.
Mais les plus vieilles religions à traditions écrites n’ont vu le jour qu’à partir du troisième grand groupe, celui des religions polythéistes antiques pratiquées vers 3500 avant J-C. Dans cette catégorie, la religion sumérienne née en Mésopotamie est connue comme la plus ancienne avec une date d’apparition inconnue. C’était le premier système de croyances à tradition écrite possédant une multitude de divinités à qui l’on attribuait des fonctions précises.
On pouvait ainsi faire une différence nette entre les dieux majeurs et les dieux mineurs. Les dieux du premier groupe étaient érigés en maître et protecteur d’une ou plusieurs cités et possédaient au moins un temple où l’on déposait des offrandes tout en priant pour le salut. On y pratiquait aussi plusieurs rites codifiés afin d’avoir l’intercession des dieux et dont seuls les prêtres et prêtresses avaient le don d’en interpréter les signes.
Tout était parfaitement organisé de sorte que les relations entre les hommes et les dieux se maintiennent à aimable distance dans la crainte, le respect et le service aux divinités. La religion sumérienne avait des récits et mythes sur divers sujets comme la création du monde, le déluge et bien d’autres choses qui ont inspiré les religions abrahamiques. Elle était tellement ancrée dans la vie quotidienne du peuple qu’il était impossible de la distinguer de la vie politique et de l’État.
Les origines de cette première religion
La Mésopotamie est un vaste territoire situé près de l’embouchure du Tigre et de l’Euphrate. Elle correspond en partie à l’Irak et la Syrie actuels et comprend deux régions topographiques. Nous avons au nord, une zone de plateaux favorisant les cultures pluviales et au sud, une zone de plaines où se pratique une agriculture basée sur l’irrigation. Il faut noter que cette région était inhospitalière avec ses nombreuses inondations et ses marécages. Ainsi ce n’est qu’à partir du VIe millénaire avant J.-C qu’un peuple d’origine inconnue maitrisant les techniques culturales s’installe et aménage ces terres. Une civilisation organisée en plusieurs cités-États occupe désormais le territoire, créant divers mythes, récits et lois afin structurer la société.
Les peuples de la Mésopotamie en l’occurrence les Sumériens croyaient en un ensemble de dieux gouvernant chacun un élément précis de l’univers. C’était pour eux un groupe d’êtres anthropomorphes avec pour seule différence des accessoires qui ornaient leur corps. Ils vivaient en communauté comme les humains, mais dans un monde invisible à l’homme et possédaient des capacités surhumaines. Les quatre principales divinités que les Sumériens vénéraient étaient An, Ki, Enlil et Enki. Le premier nom était celui du dieu du Ciel, le deuxième celui de la déesse de la Terre, le troisième celui du dieu de l’Air et le quatrième celui du dieu de l’Eau.
Ces divinités représentaient des figures à craindre, car elles dirigeaient le cosmos. Elles guidaient et contrôlaient les choses et les humains à travers des plans bien définis ainsi que des lois dûment prescrites. Les dieux possédaient les ME (essence de toutes choses) et pouvaient ainsi sceller le destin des humains. Après les quatre divinités principales nous avons les trois divinités du ciel que sont : Nanna (dieu de la Lune), Utu (dieu du Soleil) et Inanna (déesse des cieux, de l’amour, de la fertilité et de la guerre).
Les rites, codes et divers récits
Les rites, codes et récits de la religion sumérienne ont été conservés au fil des millénaires sur des tablettes en argile. C’était sur ces derniers que les prêtres gravaient en écriture cunéiforme les divers textes sacrés, prières et recommandations au peuple. Ainsi il a été constaté que plusieurs religions abrahamiques telles que le judaïsme, le christianisme et même l’islam ont emprunté plusieurs récits aux Sumériens.
C’est le cas des 11 premiers chapitres de la genèse hébraïque relevant plusieurs similitudes avec le poème sumérien Enki et Ninhursag. Dans ces passages, la description de l’incroyable jardin d’Eden où il fait constamment beau est identique à celui du Dilmun sumérien. Cet endroit possède la même situation géographique, les mêmes fleuves, le même péché originel et la même souffrance.
Les Sumériens ont aussi écrit le premier récit relatant le déluge avec Ziusudra considéré comme le Noé sumérien. Le mythe est repris presque identiquement par les Babyloniens et réadapté par les religions monothéistes.
Les différents étapes de passage au monothéisme
Les Sumériens étaient polythéistes, mais leur civilisation a beaucoup influencé au cours des millénaires les peuples les ayant succédé. Ainsi les religions monothéistes telles que nous les connaissons aujourd’hui se sont constituées progressivement sur certaines bases polythéistes. Ils ont évolué en suivant trois étapes clés que sont :
- l’hénothéisme d’Abraham qui reconnaissait l’existence des autres dieux, mais décidait de n’en adorer exclusivement qu’un seul ;
- la monolâtrie de Moïse qui ressemblait beaucoup à de l’hénothéisme d’Abraham à la différence que cette dernière ne niait pas l’existence d’autres dieux, mais ne reconnaissait pas dans le même temps explicitement cela ;
- le monothéisme des prophètes de l’exil à Babylone qui prônait l’existence d’un Dieu unique, le seul à qui l’on pourrait reconnaitre toute qualité divine.
C’est après la crucifixion et la résurrection de Jésus-Christ, le fils unique de Dieu que le christianisme vit le jour. Il demeure aujourd’hui la première religion monothéiste comptant le plus grand nombre de fidèles.